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RBC Dominion Securities Inc. c. Merrill Lynch Canada Inc., 2008 CSC 54

RBC Dominion Securities Inc. c. Merrill Lynch Canada Inc., 2008 CSC 54

« Tous les coups ne sont pas permis »

Contrat de travail-Obligation d’agir de bonne foi-Renseignements confidentiels

Dans cette affaire qui a eu lieu en Colombie-Britannique, les employés d’une succursale de RBC Dominion Securites Inc., un courtier en valeurs mobilières, ont massivement quitté RBC pour se joindre au concurrent Merril Lynch. RBC n’a pu conserver qu’un maigre pourcentage de sa clientèle et a ainsi perdu des revenus et des profits importants.

La Cour suprême Canada, renversant en partie le jugement de la Cour d’Appel de Colombie-Britannique, a maintenu la condamnation du directeur de la succursale de RBC a plus de 1 million et demi de dollars de dommages pour avoir manqué à son devoir d’agir de bonne foi envers son employeur « ce contrat lui demandait implicitement de retenir les employés de RBC qu’il supervisait » (le jugement au paragraphe 13).

  • Par ailleurs, au paragraphe 19, la Cour s’exprime ainsi : « Pour les besoins de la présente affaire, le paragraphe qui précède résume bien l’état actuel du droit. Le contrat d’emploi prend fin lorsque l’employeur ou l’employé met fin au lien d’emploi, bien que des obligations résiduelles puissent subsister. Un employé qui met fin à son emploi peut être tenu à des dommages-intérêts s’il n’a pas donné un préavis raisonnable et s’il n’a pas respecté certaines obligations résiduelles. Sous réserve de ces obligations, l’employé est libre de faire concurrence à son ancien employeur ».

L’employé peut concurrencer son ex-employeur même dans la période de préavis mais il doit donner un préavis. Dans ce cas précis, si RBC avait eu droit à un préavis raisonnable, elle aurait pu prendre des mesures pour conserver sa clientèle.

Les employés et le directeur ont aussi été condamnés à des dommages punitifs de même que Merril Lynch qui a été condamné à payer (225 000 $) de dommages pour concurrence déloyale.

Bien que cette affaire relève de la « common law », notre droit civil au Québec comporte évidemment des dispositions de même nature.

Ainsi, les artices 2088 et 2089 du Code civil du Québec stipulent :

  • 2088. Le salarié, outre qu’il est tenu d’exécuter son travail avec prudence et diligence, doit agir avec loyauté et ne pas faire usage de l’information à caractère confidentiel qu’il obtient dans l’exécution ou à l’occasion de son travail.
  • Ces obligations survivent pendant un délai raisonnable après cessation du contrat, et survivent en tout temps lorsque l’information réfère à la réputation et à la vie privée d’autrui.
  • 2089. Les parties peuvent, par écrit et en termes exprès, stipuler que, même après la fin du contrat, le salarié ne pourra faire concurrence à l’employeur ni participer à quelque titre que ce soit à une entreprise qui lui ferait concurrence.
  • Toutefois, cette stipulation doit être limitée, quant au temps, au lieu et au genre de travail, à ce qui est nécessaire pour protéger les intérêts légitimes de l’employeur.
  • Il incombe à l’employeur de prouver que cette stipulation est valide.
  • Il est intéressant de noter que dans ce jugement on souligne le fait que par contrat il eut été possible d’empêcher les employés de concurrencer l’employeur après la fin de l’emploi mais que RBC avait choisi de ne pas le faire parce qu’une exigence de la sorte pouvait lui nuire dans ses efforts de recrutement.

En guise de conclusion, posons qu’il est prudent d’avoir un contrat écrit avec certains employés établissant des limitations au droit de l’employé de quitter et de faire concurrence à l’employeur.