Groupe Dupuis Paquin

Chroniques

Giabouranis c. Aux Rythmes des saisons inc. (2014 QCCS 5579)

Jeudi le 26 février 2015

Sur le caractère libératoire d'une offre de remplir son obligation contractuelle

Dans l'affaire Giabouranis c. Aux Rythmes de saisons inc., rendue le 18 novembre 2014 par l'Honorable Juge Danielle Turcotte, la Cour supérieure a eu l'occasion de se pencher à la fois sur le délai donné dans une mise en demeure et sur le caractère libératoire d'une offre de remplir son obligation contractuelle.

Dans cette affaire, le demandeur avait retenu les services de la société défenderesse, une entreprise spécialisée en aménagement paysager pour construire notamment un mur de soutènement sur le pourtour de sa propriété. Alors que les travaux n'étaient pas terminés, le demandeur transmettait une mise en demeure en date du 23 mai 2012 à la société Aux Rythmes des saisons inc. l'avisant qu'une partie du mur de soutènement menaçait de s'effondrer et lui donnant un délai de sept jours pour se rendre sur les lieux et fournir des plans certifiés d'un ingénieur pour corriger l'ouvrage. Sept jours plus tard, le demandeur informait la défenderesse qu'il entendait démolir le mur et le reconstruire à ses frais. Il est à noter que dès la réception de la mise en demeure, la défenderesse avait consulté un avocat et celui-ci avait informé le demandeur que son client avait mandaté un ingénieur en structure. Celui-ci a d'ailleurs examiné le mur et rédigé un rapport dans lequel il proposait des correctifs. Entre temps, le demandeur diligentait des procédures et demandait la condamnation de la défenderesse à lui verser des dommages pour le préjudice subi. Durant les procédures, la défenderesse offrait au demandeur d'effectuer les réparations. Mais cette offre était refusée et le demandeur décidait d'engager un autre entrepreneur, lequel prit la décision de démolir le mur au complet et de le reconstruire.

Après avoir considéré que la démolition du mur ne s'imposait pas et que le mur pouvait être réparé, la Cour a conclu que « le défaut de permettre à l'entrepreneur de le faire [était] fatal ».

Dans un premier temps, la Cour a retenu que le délai de sept jours donné à la société Aux Rythmes des saisons inc. était déraisonnable car « de toute évidence, l'entrepreneur ne pouvait, à l'intérieur d'un si court laps de temps, consulter un avocat, mandater un ingénieur, lui faire visiter les lieux et obtenir le résultat des analyses de résistance du béton à la compression, de même que le rapport final de l'ingénieur », étant donné que « ce sont tous des professionnels ayant un agenda chargé » et sans compter que « le client n'avait aucune idée de l'insatisfaction du client avant de recevoir la lettre du 23 mai ». La Cour en a ainsi déduit que cette lettre ne pouvait « être considérée comme une mise en demeure valable puisque l'une des prescriptions de l'article 1595 C.c.Q. [était] ignorée, soit l'obligation de donner un délai suffisant à l'entrepreneur ». Dans un deuxième temps, la Cour a pris soin de rappeler que « l'article 1595 C.c.Q. mentionne que l'entrepreneur peut toujours, dans un délai raisonnable, exécuter son obligation ». Or en l'espèce, la Cour a considéré que l'offre faite par la défenderesse au demandeur, offre qui consistait à exécuter les travaux en conformité avec les spécifications de l'ingénieur, était une offre bonne et valable et qui constituait « un paiement puisque l'entrepreneur [avait] toujours été disposé à corriger ses travaux ». La Cour a dès lors considéré que l'action diligentée par Giabouranis à l'encontre de la société Aux Rythmes des saisons inc. devait être rejetée.

Cette décision nous rappelle ainsi un principe bien important : il ne faut jamais prendre à la légère une offre faite par un entrepreneur de corriger les travaux qu'il a exécutés. Si cette offre est faite dans un délai raisonnable, elle peut être déclarée bonne et valable et donc libératoire par les tribunaux, rendant ainsi impossible toute poursuite en dommages contre l'entrepreneur.

 

Khamis c. Dila inc. (2014 QCCQ 3048)

Jeudi le 29 janvier 2015

La responsabilité de l'actionnaire unique en cas de liquidation d'une société régie par la Loi sur les sociétés par actions du Québec (L.S.A.Q.)

Dans la décision Khamil c. Dila inc., rendue par l’Honorable Juge Monique Fradette, la Cour du Québec a eu l’occasion de rappeler les règles qui régissent la responsabilité de l’actionnaire unique d’une société constituée en vertu de la L.S.A.Q.

Les faits de l’espèce sont très simples : les défendeurs sont une société régie selon les dispositions de la L.S.A.Q. et son actionnaire unique. Le demandeur veut condamner les défendeurs à lui payer la somme de 12 834,09$ au titre du préjudice qu’il prétendait avoir subi en raison du non-respect d’une offre de location qui liait les parties.

Il est à noter que le recours avait initialement été diligenté contre la société Dila inc. et qu’il a été amendé pour viser l’actionnaire unique, suite à la dissolution volontaire de la société, le 20 juin 2012. Lors de la dissolution, celle-ci avait produit une résolution spéciale de son actionnaire unique contenant la mention : « Le conseil d’administration de la société a exécuté les obligations de cette dernière, en a obtenu la remise ou y a pourvu autrement; le reliquat de ses biens a été partagé (le cas échéant) ». Bien entendu, l’actionnaire unique demandait à la Cour de rejeter l’action intentée contre lui personnellement au motif qu’il n’avait pas cautionné les obligations de sa société et que dès lors, sa responsabilité ne pouvait être engagée.

Or, après avoir considéré que l’offre de location liait les parties et avoir rappelé que la L.S.A.Q. « modifie considérablement la responsabilité de l’actionnaire unique lorsqu’il décide de procéder à sa dissolution », la Cour du Québec a fait application de l’article 313 L.S.A.Q. et considéré que « suite à la dissolution d’une société par son actionnaire unique, les droits et obligations de la société passent à son ancien actionnaire, lequel devient responsable des obligations de la société qu’il a dissoute, que les dettes soient ou non connues ». La Cour du Québec en a donc conclu que la responsabilité du défendeur était engagée, compte tenu de la dissolution de la société défenderesse.

Prendre la décision de dissoudre une société régie par la L.S.A.Q. et dont on est actionnaire unique ne s’improvise pas! Cela peut avoir en effet des conséquences sur le plan de la responsabilité personnelle!

 

Aéro-Photo (1961) inc. c. Raymond (2014 QCCA 1734)

Jeudi le 23 octobre 2014

La continuité d'entreprise dans un contexte de faillite

Dans une décision unanime, Aéro-Photo (1961) inc. c. Raymond, la Cour d’appel du Québec a eu l’occasion de se pencher sur l’application de l’article 2097 du Code civil du Québec dans un contexte de faillite. Il s’agissait de déterminer si la vente des éléments d’actifs de Groupe Alta à Aéro-Photo par le syndic de faillite constituait ou non une vente d’entreprise au sens de cet article et si elle avait pour effet de lier cette dernière à Benoît Raymond. Les enjeux étaient importants puisque Aéro-Photo faisait appel d’un jugement qui l’avait condamnée notamment à verser à Benoît Raymond une somme de 659 322,49$ à titre d’indemnité de fin d’emploi.

Tout d’abord, l’article 2097 C.c.Q. dispose que l’aliénation de l’entreprise ou la modification de sa structure juridique par fusion ou autrement ne met pas fin au contrat de travail et que ce contrat lie l’ayant cause de l’employeur. Pour que les dispositions de cet article puissent s’appliquer, deux conditions doivent être satisfaites. L’entreprise doit être continuée et il doit y avoir un lien de droit entre les employeurs successifs.

En l’espèce, la Cour d’appel du Québec a considéré que le dossier présentait « un cas clair de continuité d’entreprise ». De plus, la Cour a estimé qu’il était inutile que le lien de droit soit direct entre Groupe Alta, l’employeur précédent, et Aéro-Photo, le nouvel employeur. Ce qui l’a donc amenée à conclure que « l’article 2097 C.c.Q est […] susceptible de recevoir application malgré la faillite d’un premier employeur ».

En pratique, cela signifie que même si l’entreprise est cédée par l’intermédiaire d’un syndic de faillite, les contrats de travail sont bel et bien transmis au repreneur, dès lors qu’il y a continuité d’entreprise. Il s’agit là d’un point important que tout repreneur doit bien avoir en tête lorsqu’il procède à une acquisition d’entreprise dans un contexte de faillite.

 

Corporation d'Urgences-santé de la région de Montréal métropolitain c. Novacentre Technologie ltée (2014 QCCA 1594)

Jeudi le 25 septembre 2014

Mise en demeure : délai à respecter!

Dans l’affaire Corporation d'Urgences-santé de la région de Montréal métropolitain c. Novacentre Technologie ltée, la Cour d’appel a eu l’occasion d’examiner la question de savoir si le délai accordé dans une mise en demeure pour corriger des défauts contractuels était raisonnable ou non.

En l’espèce, et pour résumer brièvement les faits, nous dirons que Novacentre Technologie ltée (« Novacentre ») s’était engagée par contrat à livrer des ambulances à Corporation d'Urgences-santé de la région de Montréal métropolitaine (« CUS »). Cependant, en cours d’exécution du contrat et après plusieurs mises en demeure, CUS a considéré qu’il y avait eu manquement aux obligations contractuelles et elle a été amenée à résilier le contrat pour cause.

Dans le jugement rendu en première instance, l’Honorable Juge Pepita G. Capriolo a retenu notamment que le délai de 7 jours accordé par CUS à Novacentre pour remédier aux défauts était « nettement déraisonnable en ce qu’il était impossible […] de remédier à la longue liste de non-conformités énoncées dans l’avis tout en se conformant au délai fixé […] ».

Or la Cour d’appel, à l’unanimité, a considéré que le raisonnement du juge de première instance était erroné.

Au préalable, la Cour d’appel a pris soin de rappeler que « conformément aux enseignements de la jurisprudence, l’ensemble des circonstances doit être pris en considération afin de déterminer le caractère raisonnable du délai accordé par le créancier ». De plus, « lorsque la situation du débiteur est désespérée, et qu’accorder un délai plus long n’aurait rien changé, le juge peut décider qu’il n’y a pas lieu de sanctionner l’action subite du créancier, c’est-à-dire la soudaineté de la résiliation ou la brièveté du délai accordé », de sorte que « l’exigence d’une mise en demeure ne doit pas constituer une démarche formaliste permettant au débiteur d’éviter les conséquences de son inexécution ».

En l’espèce, la Cour d’appel a retenu que Novacentre avait été mise en demeure plusieurs fois avant de recevoir l’avis de résiliation. De la même manière et avant de recevoir cet avis, « elle avait su […] que son véhicule modèle n’était pas conforme aux exigences contractuelles et que ces non-conformités étaient suffisantes pour justifier la résiliation du contrat […] ».

La Cour d’appel a dès lors conclu que dans les faits, Novacentre avait eu beaucoup plus qu’un délai de 7 jours pour remédier aux défauts qui lui étaient reprochés et donc que « c’est à force de ne pas remédier à ces déficiences qu’elle a fini par provoquer la résiliation ».

Lorsqu’il s’agit d’apprécier le délai imposé dans une mise en demeure, tout est donc question de circonstances!

 

Globalex Gestion de risques inc. c. Deslauriers & Associés inc. et Raymonde Lafrenière (2014 QCCS 2636)

Jeudi le 18 septembre 2014

Perdre des clients ne suffit pas!

Dans un jugement du 10 juin 2014 rendu par l'Honorable Juge Lucie Fournier, la Cour supérieure s’est prononcée sur la question de savoir s’il y avait eu ou non violation d’une clause de non-sollicitation.

En l’espèce, Globalex Gestion de risques inc. reprochait à Raymonde Lafrenière, son ancienne employée, d’avoir sollicité quatre de ses clients pour son profit personnel et celui de son nouvel employeur, Deslauriers & Associés inc., d’avoir divulgué des informations confidentielles visant à la discréditer auprès de sa clientèle dans le but de favoriser ce dernier et d’avoir sollicité une de ses employés. Quant à Deslauriers & Associés inc., elle lui reprochait d’avoir participé ou toléré les gestes de Raymonde Lafrenière. Ce qui était bien entendu contesté par Raymonde Lafrenière et Deslauriers & Associés inc.

En l’espèce et s’agissant de la violation de la clause de non-sollicitation, l’Honorable juge Fournier a considéré que Globalex Gestion de risques inc. n’était pas parvenue à démontrer l’existence de gestes de sollicitation selon les critères établis par la doctrine et la jurisprudence. Elle a en effet retenu que « la conviction de monsieur Brouillette et ses déductions à partir des lettres de transfert ne peuvent suppléer l’absence de preuve d’actes ou de faits précis qui contreviendraient aux obligations de madame Lafrenière ». Elle a considéré que la preuve non contredite était à l’effet que les anciens clients de Globalex Gestion de risques inc. avaient pris contact avec Raymonde Lafrenière par eux-mêmes. De plus, elle a écarté les imprécisions de dates contenues dans le témoignage de Raymonde Lafrenière, au motif qu’elles ne constituaient pas « des présomptions de fait permettant de conclure à la violation des obligations des défenderesses ».

Au préalable l’Honorable juge Fournier avait pris soin de rappeler que la sollicitation se définit comme « une action, un geste positif, voire de la pression et de l’insistance à obtenir la clientèle sollicitée » et qu’« un acte doit être posé visant à inciter une personne à agir d’une certaine façon ».

Cette décision vient confirmer que les exigences en matière de violation d’une clause de non-sollicitation sont élevées. Prouver la violation d’une telle clause s’annonce difficile!

 

6392041 Canada inc. c. 9201-4356 Québec inc. (2014 QCCS 1797)

Jeudi le 11 septembre 2014

Obligation de payer des redevances!

Dans un jugement du 15 avril 2014 rendu par l’Honorable Juge Sophie Picard, la Cour supérieure s'est penchée sur l’épineuse question de savoir si un franchiseur peut ou non contraindre un franchisé à lui payer des redevances.

Le contexte de l’affaire était le suivant. Au mois d’octobre 2013, la société 6392041 Canada inc., qui exploite le réseau de franchise Cabana Sol, a exigé que ses franchisés s’approvisionnent en équipements, accessoires et produits pour leurs salons de bronzage franchisés Cabana Sol auprès d’un fournisseur autre que celui qui était initialement désigné. Comme le franchiseur maintenait cette décision malgré le mécontentement des franchisés, sept d’entre eux ont décidé de ne plus lui verser leurs redevances. Ces franchisés estimaient en effet qu’en leur imposant ce changement, le franchiseur contrevenait à ses obligations en vertu du contrat de franchise.

Après avoir envoyé une mise en demeure à chacun des sept franchisés et retiré leur nom de son site Web, le franchiseur a entamé des procédures en résiliation du contrat de franchise et en dommages. Dans le cadre de ces procédures, le franchiseur a présenté une requête pour ordonnance de sauvegarde afin d’obtenir la condamnation de ces franchisés à lui verser immédiatement les arrérages de redevances accumulés à la date d’introduction de ses procédures ainsi que les redevances à venir, et ce jusqu’à ce que le jugement final soit rendu sur ses requêtes en résiliation du contrat de franchise et en dommages.

Au préalable, l’Honorable Juge Picard a pris soin de souligner que « l'ordonnance de sauvegarde est réservée aux situations exceptionnelles et qu'elle ne constitue pas la procédure appropriée pour obtenir le paiement d'une créance ».

Ensuite l’Honorable Juge Picard a examiné chacun des critères à rencontrer pour émettre une ordonnance de sauvegarde et elle a conclu que :

  • En l'espèce, il y avait apparence de droit dès lors qu'il était démontré que le choix des fournisseurs appartenait au franchiseur et que les franchisés continuaient d'exploiter leurs salons de bronzage en utilisant la marque de commerce CABANA SOL, propriété du franchiseur.
  • Le préjudice subi par le franchiseur était sérieux et irréparable puisque les franchisés poursuivis représentaient plus du tiers des franchisés et que selon les dires de leur propre procureur, ils ne réalisaient pas de profits importants, de sorte qu'il y avait à craindre que le franchiseur ait de la difficulté à récupérer les redevances accumulées jusqu'au jugement final s'il avait gain de cause.
  • La prépondérance des inconvénients penchait en faveur du franchiseur dans la mesure où les franchisés pouvaient continuer l'exploitation de leurs salons de bronzage et réaliser des revenus, dans la mesure où ils semblaient continuer à acheter leurs produits auprès de l'ancien fournisseur désigné.
  • La condition de l'urgence était existante car il y avait un risque que les autres franchisés du réseau soient tentés de cesser eux aussi de payer les redevances au franchiseur, tout en continuant d'exploiter leurs salons de bronzage.

L’Honorable Juge Picard a donc accueilli en partie la requête pour ordonnance de sauvegarde qui lui était présentée par le franchiseur et a ordonné aux franchisés de lui verser les deux tiers des arrérages de redevances accumulés à la date d’introduction des procédures, puis les deux tiers des redevances mensuelles à venir stipulées à leurs contrats, jusqu'à la date du jugement final. L’Honorable Juge Picard a en outre déclaré qu’à défaut par ces franchisés de verser les redevances, ils seraient forclos de contester la réclamation du franchiseur relativement au paiement desdites redevances, de sorte que le franchiseur pourrait demander qu’un jugement par défaut soit prononcé contre eux. En contrepartie, L’Honorable Juge Picard a ordonné au franchiseur de replacer les noms des franchisés sur son site Web

 

Les modifications majeures à la Loi sur les marques de commerce qu'il faut connaître absolument

Jeudi le 4 septembre 2014

Dans le cadre du Plan d'action économique 2014, le gouvernement du Canada s’était engagé à moderniser le cadre de la protection de la propriété intellectuelle au Canada, afin qu’il soit davantage en harmonie avec les pratiques en cours à l’échelle internationale. Il s’était donné notamment pour objectif que le Canada puisse adhérer aux trois traités internationaux que sont le Protocole de Madrid, le Traité de Singapour ainsi que l'Arrangement de Nice et qui régissent les marques de commerce.

Or, le 19 juin 2014, le Projet de loi C-31 intitulé Loi no1 sur le plan d’action économique de 2014, qui vient notamment modifier la Loi sur les marques de commerce, a reçu la sanction royale. Pour le moment, on ignore la date d’entrée en vigueur du Projet de loi C-31 mais il est fort probable que cela se fasse au courant de l’année 2015. Le Règlement sur les marques de commerce est actuellement en cours de révision. Les systèmes informatiques de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada doivent aussi être mis à niveau. De plus, des consultations publiques relatives à la nouvelle législation ont été annoncées.

Les modifications apportées à la Loi sur les marques de commerce par le Projet de loi C-31, qui ne sont pas encore en vigueur pour le moment, vont créer des changements majeurs.

Quant à l’enregistrement des marques de commerce à l’international :
Le fait que le Canada adhère au Protocole de Madrid va faciliter grandement l’enregistrement des marques de commerce à l’international. Grâce à cette adhésion, le propriétaire d’une marque de commerce enregistrée au Canada bénéficiera d’un système d’enregistrement à l’international très efficace lui permettant de l’enregistrer dans le monde entier.

Quant aux règles relatives à l’enregistrement des marques de commerce :
La notion d’utilisation de la marque de commerce va disparaître. En effet, il ne sera plus nécessaire d’utiliser la marque de commerce pour obtenir son enregistrement. La marque de commerce sera enregistrée notamment dès lors qu’elle est utilisée ou que l’on a l’intention de l’utiliser au Canada.

Il ne sera pas non plus nécessaire de divulguer une date de premier emploi comme c’est le cas actuellement.

Quant aux coûts :
La durée de la protection d’une marque de commerce sera moindre. Elle ne sera valide que pendant 10 ans et non plus 15 ans comme c’est le cas actuellement.

Le descriptif des services et/ou des produits devra respecter la classification de Nice. Les nouveaux frais, dont on ignore le montant pour le moment, seront vraisemblablement fixés en fonction du nombre de classes de produits et/ou services, ce qui n’aura peut-être plus rien à voir avec ce que l’on connaît pour le moment. En effet, les frais qui sont encourus actuellement lors du dépôt d’une demande et qui sont de 250 $, s’appliquent pour une liste illimitée de produits et des services.

En conclusion, nous dirons que ces changements majeurs sont autant de bonnes raisons pour inciter tous ceux et celles qui pensent enregistrer une marque de commerce au Canada à le faire rapidement et avant la fin de l’année!

 

Nouveaux seuils de compétence

Jeudi le 28 août 2014

Nouveau Code de procédure civile : modification des seuils de compétence dès l'automne 2015!

Le 20 février 2014, le projet de loi no28 instituant le nouveau Code de procédure civile a été adopté à l’Assemblée nationale.

Parmi les mesures phares, qui ont été retenues par le législateur, on note le relèvement de certains seuils judiciaires.

Le seuil des réclamations pouvant être faites à la Division des petites créances de la Cour du Québec passe ainsi de 7 000 $ à 15 000 $. Le seuil des réclamations devant la Cour du Québec fait un bond de 70 000$ à 85 000 $. Il est à noter que ce montant sera indexé et qu’il fera donc l'objet d'un ajustement périodique par l'effet de la loi. Le seuil pour les appels de plein droit passera quant à lui de 50 000$ à 60 000$.

Les dispositions du nouveau Code de procédure civile entreront en vigueur à l'automne 2015. Elles visent à faire en sorte que la justice civile au Québec soit plus accessible, plus efficace et plus rapide.

 

Agence Océanica inc. c. Agence du revenu du Québec (2014 QCCA 1385)

Jeudi le 21 août 2014

Travailleur autonome et salarié : une distinction de 165 000 $

Dans l’affaire Océanica inc. c. Agence du revenu du Québec, la Cour d’appel a eu l’occasion d’examiner la question de la distinction entre travailleur autonome et salarié.

En l’espèce, Agence Océanica inc. faisait appel d’un jugement de la Cour du Québec en date du 28 mai 2012 prononcé par l’Honorable juge Marie Michelle Lavigne qui avait rejeté les avis d’appel qu’elle avait déposés à l’encontre de deux avis de cotisation établis par l’Agence du revenu du Québec pour les années d’imposition 2007 et 2008.

Agence Océanica inc. exploitait depuis 2002 une agence de placement de personnel infirmier et desservait des clients dans le milieu hospitalier, tels que les hôpitaux, les centres d'hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) ainsi que les centres locaux de services communautaires (CLSC). Agence Océanica inc. faisait valoir que les personnes qu’elle recrutait et qu’elle plaçait chez ses clients étaient des travailleurs autonomes et non des salariés, de sorte qu’elle n’était pas dans l‘obligation de prélever sur leurs rémunérations les cotisations exigées pour les salariés. Ce qui était bien entendu contesté par l’Agence du revenu du Québec.

La décision de la Cour d’appel, qui a été rendue par l’Honorable juge France Thibault, mérite d’être soulignée car outre le fait qu’il s’agisse d’une décision unanime, cette décision vient préciser la notion de travailleur autonome au sens de la Loi sur les impôts.

Tout d’abord, la Cour a relevé qu’« il n’existe pas de définition commune du « salarié » dans les différentes lois applicables en matière de relations d’emploi, mais [que] les critères utilisés par les tribunaux dans les divers contextes se rejoignent ».

De plus et après avoir souligné que « la notion de travailleur autonome existe dans certaines lois (par exemple, la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles), mais […] ne se trouve pas comme telle dans la Loi sur les impôts », la Cour a considéré que « c’est donc la notion de contrat de service prévue au Code civil (et la jurisprudence qui en découle) qui s’applique pour déterminer si une personne est un travailleur autonome, par opposition à un employé au sens de la Loi sur les impôts ».

Or, en l’espèce, l’Honorable juge France Thibault a conclu que les personnes placées par Agence Océanica inc. chez ses clients étaient bel et bien des salariés, après avoir relevé ce qui suit : « La personne recommandée par l’appelante est un salarié parce qu’elle effectue son travail sous la direction et le contrôle d’une entité. Les sources de droit applicables – texte législatif, jurisprudence et doctrine – sont unidirectionnelles. Les facteurs de l'intégration complète d'une personne dans la structure organisationnelle du client tant au point de vue hiérarchique, des protocoles de soins à observer, de l'assignation du travail, de l'horaire de travail, de l'évaluation du travail, etc. permettent de conclure à l'existence d'un contrat de travail. De plus, les éléments caractéristiques du contrat de service – libre choix des moyens d'exécution, du rythme d'exécution, risque de perte et chance de profit, etc. – sont absents ».

Il est important de noter que la Cour avait au préalable relevé que les personnes placées par Agence Océanica inc. chez un client devaient respecter les instructions données par ce dernier lors de l’exécution de leur prestation, qu’elles ne mettaient à la disposition des clients aucun équipement nécessitant un investissement important et surtout qu’elles n’encouraient aucun risque financier.

Les cotisations adressées par l’Agence du revenu du Québec à Agence Océanica inc., qui totalisaient plus de 165 000$ pour les seules années 2007 et 2008, ont donc été maintenues. Comme nous pouvons le voir à la lecture de cette décision, la frontière entre travailleur autonome et salarié n’est pas toujours aisée à délimiter et il faut être prudent en la matière car cela peut avoir des conséquences très lourdes, notamment sur le plan financier.

 

Jugement Asselin c. Groupe pétrolier Olco ULC inc. (2014 QCCQ 2733)

Jeudi le 14 août 2014

On a le droit d'être informé, à condition de faire des efforts pour ce faire

Dans un jugement du 21 mars 2014 rendu par l'Honorable Juge Pierre Coderre, la Cour du Québec s'est penchée sur la question de savoir si les contrats qui lui étaient soumis étaient ou non des contrats d'adhésion.

Dans un premier temps, l'Honorable Juge Coderre a rappelé les deux conditions à respecter pour qu'un contrat soit considéré comme étant un contrat d'adhésion. Le contrat doit avoir été rédigé par une partie et soumis à l'autre pour considération et signature. De plus, la partie à qui le contrat est soumis doit être en mesure de démontrer qu'il lui a été impossible de discuter ou de négocier les termes du contrat.

En l'espèce et après avoir retenu que Groupe pétrolier Olco ULC inc. avait agi de bonne foi et n'avait pas résilié les deux contrats qui l'unissaient à madame Asselin de manière abusive, l'Honorable Juge Coderre a retenu que ces deux contrats n'étaient pas des contrats d'adhésion dans la mesure où madame Asselin n'avait pas été empêchée de discuter les termes de ces contrats ni de négocier des clauses différentes. De plus, l'Honorable Juge Coderre, après avoir noté que madame Asselin était peu ou pas expérimentée dans le domaine des affaires à l'époque de la signature des contrats, a pris en compte le fait qu'elle n'avait pas jugé opportun et nécessaire de consulter des professionnels, que ce soit un avocat ou un comptable, afin que le mécanisme de résiliation des deux contrats lui soit expliqué. L'Honorable Juge Coderre, tout en citant les auteurs Jean-Louis Baudouin et Pierre-Gabriel Jobin dans leur livre intitulé Les Obligations, a aussi rappelé que celui qui contracte une obligation a l'obligation de se renseigner et que « l'obligation de se renseigner est l'envers de la médaille de l'obligation d'information : c'est la limite qui lui est imposée.» Cela signifie donc que si l'on entend invoquer à l'encontre de son cocontractant un manquement à son devoir d'information, encore faut-il avoir pris ses dispositions pour s'informer soi-même, notamment en consultant un professionnel qualifié.